Réorganisation du Forum

Detroit– 2027

Tous ces humains qui couraient dans la rues, les cris, les pleurs, les détonations lointaines, toute cette agitation …
C’était la guerre.
La guerre, ce jeu sanglant auquel jouaient nombre d’humains, un jeu où l’on misait sa vie …
Une caresse, une larme s’écrasant sur mon pelage soyeux, des excuses dont je ne comprenais pas le sens. Ils partaient. Et, au fond de moi je savais qu’ils n’allaient jamais revenir. Un petit gémissement s’échappa de ma gorge quand je les vis passer la porte pour se jeter dans la cohue des autres humains qui se massaient dans la rue. Je restai longuement assis devant la fenêtre, contemplant le chaos alentour. Les gens se ruaient dans des camions verts sous les vociférations de militaires. Ils évacuaient la ville.
Un détail attira mon attention : quel était ce point noir dans le ciel qui se rapprochait inévitablement ? Je ne savais trop ce que c’était, mais mon instinct me disait que c’était dangereux. Très dangereux.
Je courus me réfugier dans le jardin, derrière la maison, aussi vite que je le pouvais. A peine eussé-je franchi la porte extérieure que j’entendis le sifflement du projectile qui se rapprochait. J’avais peur. Peur pour ma vie.
Le sol trembla sous l’impact.
Les vitres explosaient, les gratte-ciel tombaient en ruines, les maisons s’effondraient, les arbres heurtaient le sol avec un bruit sourd. La poussière qui m’entourait me faisait suffoquer et les débris tombés sur mon dos m’empêchaient de bouger.
Le calme revint.
Seuls des toussotements troublaient le silence. Avec un effort sur-canin, je parvins à me dégager et à regarder autour de moi. La poussière qui empoisonnait l’air retombait lentement, laissant peu à peu apparaître les décombres d’une ville autrefois grandiose. Mon corps essayait de crier sa douleur, mais je ne l’écoutais pas. Non, le spectacle qui s’offrait à moi était si … Je ne saurais trouver de mots pour le qualifier. Les cadavres des humains restés là jonchaient le sol, accompagnant ceux d’oiseaux et même ceux de … Chiens … Un véritable festin pour les corbeaux qui se jetaient déjà sur les charognes. La tristesse m’envahit et guida mes pas. J’escaladai les décombres de mon ancienne maison, évitant les câbles électriques mortels, et peu importe tout ce sang qui s’échappait de mon corps. J’arrivai finalement au plus haut des ruines, de là, je pouvais observer tout un quartier maintenant réduit à néant. Je reconnus ce qu’il restait des maisons de certaines de mes connaissances, canines ou humaines. D’aussi loin que je pouvais voir, tout avait été détruit …
Je renversai la tête, et de ma gueule sortit un hurlement fort et profond. Qui tenait tout autant de la tristesse et de l’espoir. Bientôt, d’autres chiens sortirent des décombres.
Peut-être avions-nous tout perdu.
Mais c’était l’aube d’une vie nouvelle qui s’ouvrait devant nous.